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Ce deuxième article porte sur des sites du centre de l'île, le plateau du Dogny, le parc des Grandes Fougères et le Sentier des Sources. La flore est totalement différente des stations du Sud présentées dans le premier article, on côtoie ici les fougères arborescentes et les mousses typiques des forêts de brume à partir des 500 ou 600 mètres.
Les orchidées sont bien sûr nombreuses dans cet environnement mais parfois difficiles à apercevoir lorsqu'elles sont perchées à la cime d'arbres de plus de vingt mètres. De nombreuses épiphytes ont tout de même pu être observées dans des zones à la végétation plus basse et plus ouverte comme les forêts à Niaouli du parc des Grandes Fougères ou en forêt galerie le long du Sentier des Sources.
L'observation d'oiseaux est aussi un des points fort de la zone et l'on aperçoit régulièrement des perruches de la chaîne, Eunymphucus cornutus, des Notous, Ducula goliath, plus grand pigeon au monde très apprécié des tribus locales, ou encore le faucon calédonien, Accipiter aplocrous.
Voici donc, en quelques mots et quelques photos, une présentation très succincte de ces endroits et des orchidées rencontrées en commençant par le parc des Grandes Fougères qui regroupe plus de 40 espèces d'orchidées soit 20% des orchidées de Nouvelle-Calédonie.
Le parc des Grandes Fougères
Un vaste parc naturel de 4500 hectares, entre 400 et 700 mètres d'altitude, divisé en trois zones. La première dédiée à la chasse, la seconde à la promenade et la randonnée et la troisième à la conservation. Cette dernière bénéficie par conséquent d'une protection intégrale.
J'avais visité ce parc une première fois en 2010 lors d'une journée porte ouverte et me souviens avoir participé au reboisement de zones dégradées en plantant un "bois bleu". Après bientôt un an, les jeunes arbres vont bien et grandissent doucement. Les grillages semblent les protéger efficacement des cerfs qui, trop nombreux, dévorent les jeunes poussent et nuisent au renouvellement des forêts.
J'avais aussi rapidement exploré la zone basse du parc et rencontré Dipodium punctatum var. squamatum en fleur. Cette année, j'ai pu y passer deux journées complètes et explorer l'ensemble du parc jusqu'au pic Vincent, point culminant à 703 m exactement. J'y ai rencontré beaucoup d'espèces dont certaines très rares comme Gonatostylis vieillardii, genre endémique à la Nouvelle-Calédonie, ou la forme de Bouletia finetiana (syn. Dendrobium finetiana) au labelle rouge que l'on ne rencontre que dans ces montagnes.
Les Dendrobiums et genres apparentés sont d'ailleurs très bien représentés ici avec Eleutheroglossum poissonianum (syn. Dendrobium poissonianum), Grastidium camaridiorum (syn. Dendrobium poissonianum), Dendrobium oppositofolium, Dendrobium muricatum, Dendrobium odontochilum (forme de montagne), Thelychiton comptonii (syn. Dendrobium gracilicaule) et comme cité précédemment la forme au labelle rouge de Bouletia finetiana (syn. Dendrobium finetiana).
Le genre Bulbophyllum est aussi très présent, on rencontre couramment les espèces hexarophalos, baladeanum, ebulbe, longifolium et betchei et plus rarement Bulbophyllum pallidiflorum.
Parmi les épiphytes citons encore Liparis elliptica, Liparis condylobulbon, Liparis gibbosa, Eria rostriflora, Phreatia pachyphylla, Phreatia sp., Rhnychophretia micrantha, Oberonia equitans, Teaniophyllum sp., Microtatorchis schlechteri et même exceptionnellement Pholidota imbricata.
En plus de toutes ces épiphytes, on trouve de nombreuses terrestres comme Calanthe hololeuca et Goodyera viridiflora en forêt humide ou encore, Dipodium punctatum var. squamatum, Appendicula reflexa, Corybas neocaledonica, Chrysoglossum ornatum, Acianthus heptadactylus, Taurantha ophioglossa et Gonatostylis vieillardii dans les forêts plus ouverte dominées par les Niaoulis et enfin Eriaxis rigida, Megastylis gigas, Spathoglottis plicata, une forme claire de Taurantha ophioglossa et Thelymitra longifolia en maquis.
Un site de première importance donc avec un minimum de 36 espèces d'orchidées dont de nombreuses espèces endémiques. La déclaration en 2008 de la zone en parc naturel, les actions de reboisement et l'intérêt des calédonniens pour leur environnement laisse présager le meilleur pour cette zone.
Bouletia finetiana
synonyme: Dendrobium finetiana section grastidium
Une espèce épiphyte endémique, commune sur l'île, et qui présente une variation de couleur selon les populations. En effet, la plupart des spécimens ont leurs pétales et sépales jaunes veinés de rouge avec un labelle clair mais les spécimens du parc des Grandes Fougères sont orange-ocre avec un labelle pourpre très intense.
Les photos ci-dessous présentent, un spécimen type du parc de la Rivière Bleue (photo en haut à gauche) ainsi qu'un spécimen du parc des Grandes Fougères aux fleurs richement colorées (photo du bas).
Grastidium camaridiorum
synonyme: Dendrobium camaridiorum section grastidium
Une autre espèce endémique, très belle mais aussi très éphémère puisque sa fleur ne dure qu'une seule journée. Largement répandue sur toute l'île, il est cependant exceptionnel de la rencontrer en fleur.
Bulbophyllum hexarhophalos
Un joli Bulbophyllum notable par ses appendices oscillants qui entourent la colonne et le labelle des fleurs. La coloration de ses sépales varie du jaune au rouge.
L'espèce se rencontre aussi en Nouvelle-Guinée, aux Iles Bismarck ou encore aux Fidji à basse altitude jusqu'à 500 mètres. En Nouvelle-Calédonie, on rencontre cette espèce plutôt dans le sud, en forêt humide comme au parc de la Rivière Bleue où elle est abondante.
Calanthe hololeuca
Une espèce que l'on rencontre dans les îles du Pacifique sud et qui ici, au Parc des Grandes Fougères évolue à environ 500 mètres d'altitude en forêt humide. Comme les autres espèces de Calanthe de l'île, on la rencontre sur le bois mort et les troncs pourris en sous-bois.
Calanthe hololeuca forme une grappe de fleurs serrées complètement blanches. Elles s'ouvrent peu et jaunissent avant de faner complètement.
Corybas neocaledonicus
Une espèce minuscule qui demande à regarder où l'on met les pieds ! Seule représentante du genre Corybas en Nouvelle-calédonie, on la rencontre également au Vanuatu et en Australie. Elle se rencontre ici à 600 mètres d'altitude en forêt mixte de niaoulis sur un sol très mouillé.
Taurantha ophioglossa
synonyme: Pterostylis ophioglossa
Une espèce rencontrée ici dans le maquis du pic St-Vincent à 700 mètres d'altitudes mais aussi plus bas sur talus moussu en bordure de chemin. Les fleurs poussant à découvert dans le maquis sont plus claires et de plus petite taille que celles en forêt.
J'avais tenté une première ascension du plateau l'an dernier, le week-end suivant mon arrivé sur l'île mais le décalage horaire se faisant encore ressentir, je n'étais même pas parvenu à la moitié du parcours. En effet, avec 1000 mètres de dénivelé et encore plusieurs kms une fois arrivé sur le plateau, l'exploration des lieux demande une condition physique minimum.
Cette année fut donc la bonne et l'exploration des forêts d'altitude a valu les efforts consentis. Le beau temps a même été de la partie permettant d'avoir une magnifique vu sur la côte et les montagnes environnantes une fois arrivé sur les hauteurs du plateau.
Trois zones peuvent être grossièrement distinguées, la forêt de basse altitude des versants du plateau jusqu'à 600 m puis la forêt humide entre 600m jusqu'au plateau et enfin le plateau à 1000 mètres d'altitudes où un maquis d'altitude et des lambeaux de forêt se partagent les lieux. Les essences de ces trois zones sont différentes et les orchidées qui s'y sont établies sont également différentes.
Forêt humide de basse altitude
La forêt jusqu'à 600 mètres se caractérise par de grands arbres colonisés par les grandes fougères Asplenium nidus et Drynaria rigidula. On retrouve des espèces d'orchidées typiques des forêts humide de basse altitude de la région centrale de l'île, à savoir Rhynchophreatia micrantha, Bulbophyllum longifolia, Dockrilia bowmanii, Luisia teretifolia, Oberonia equitans, Liparis condylobulbon, Eria rostriflora et Thelychiton comptonii (syn. Dendrobium gracilicaule).
Forêt humide d'altitude
A partir de 600 mètres la forêt devient plus humide au fur et à mesure que l'on prend de l'altitude. Les fougères, arborescentes et autres, deviennent alors de plus en plus abondantes.
Au sol, les imposantes Calanthe balansae se mélangent aux fougères mais aussi Goodyera viridiflora, Malaxis taurina, Pristoglottis montana, Chrysoglossum ornatum qui, comme les Calanthes, s'établit sur les troncs mort au sol.
Earina valida et Liparis phalacrocorax font leur apparition dans les arbres mais les épiphytes sont encore assez rares et difficiles à observer.
Goodyera viridiflora :
Une espèce peu commune ici en Nouvelle-Calédonie que je n'ai rencontré qu'ici sur les pentes du plateau du Dogny et au parc des Grandes Fougères. Elle se rencontre cependant dans toute l'Asie depuis l'Inde jusqu'au Japon en passant par l'Australie !!! Pour une fois, un contre-exemple de l'endémisme des espèces indigènes de Nouvelle-Calédonie mais elle n'en reste cependant pas moins jolie.
Calanthe balansae :
Sans doute l'espèce de Calanthe la plus répandue de l'île, elle se rencontre du nord au sud dans les zones les plus humides souvent au-dessus de 800 mètres comme ici ou sur le mont Mou et le mont Ignambi mais aussi à plus basse altitude comme au le parc de la Rivière Bleue. Abondante dans les stations où elle s'établie, elle passe difficilement inaperçue.
Pristiglottis montana :
Une jolie terrestre endémique des forêts humides de montagne de Nouvelle-Calédonie. Elle a également été rencontrée dans la forêt des Koghis à la même altitude (environ 700 mètres).
Forêt et maquis du sommet du plateau
Arrivé au sommet, on débouche sur le plateau recouvert à la fois de maquis et de forêt. Ces forêts sont uniques et très différentes de celle des flancs du plateau. Elles sont particulièrement riches en orchidées et beaucoup de nouvelles espèces apparaissent ici. On peut citer Bulbophyllum lingulatum que l'on rencontre ici en grande quantité, Calanthe balansae, Dendrobium oppositofolium, Dendrobium muricatum, Bouletia finetiana (syn. dendrobium finetiana) ou encore Bulbophyllum baladeanum. La zone dénombre également beaucoup de Microtatorchis et de Taeniophyllum, orchidées sans feuilles qui ne se rencontrent que dans les zones quotidiennement embrumées comme au sommet du mont Mou ou du mont Bouot.
Le maquis est cependant moins fourni en orchidée où seul Eriaxis rigida a été observé.
Bulbophyllum lingulatum :
Une espèce abondante mais qui ne se rencontre ici que dans les lambeaux de forêt du sommet du plateau. Elle colonise alors les troncs sur de vastes zones. Son nom provient de la forme du labelle qui rappelle une langue pendue. Espèce endémique.
Bulbophyllum baladeanum :
Très jolie espèce, plutôt rare ici sur le plateau mais abondante dans d'autres stations comme dans le parc des grandes Fougères à quelques kilomètres.
Deux formes différentes sont regroupées sous le même taxon. L'une à ses pétales dorsaux soudés et l'autre, comme présenté ci-dessous, à ses pétales dorsaux libres. D'autres différences morphologiques de la plante (taille des bulbes et du rhizome) séparerait également ces deux formes. S'agit-il vraiment de la même espèce ?
Le Sentier des Sources
Un endroit paisible toujours de la région de Farino, idéal pour la promenade du dimanche en famille. Le circuit de 3 kms A/R longe une petite rivière tumultueuse où l'on y aperçoit de nombreux oiseaux dont la perruche de la chaîne près des goyaviers sauvages dont elle se nourrit. La zone est quand même habitée et transformée, seuls les abords de la rivière forment une forêt galerie abondante en espèces d'orchidées et de hoya.
On retrouve ici beaucoup de Bulbophyllum longifolium, épiphyte comme lithophyte, ainsi que de nombreux Rhynchophreatia micrantha, des Oberonia equitans et des Liparis condylobulbon. Quelques Liparis gibbosa, Bulbophyllum betchei, Eria rostriflora et Thelychiton comptonii (syn. Dendrobium gracilicaule) se rencontrent sporadiquement aussi, et exceptionnellement, un spécimen de Sarcochilus koghiensis, une espèce endémique, rare et peu abondante a aussi été observé dans la zone.
Liparis condylobulbon
Ce Liparis abonde dans toute l'Asie du Sud-est et ici aussi en Nouvelle-Calédonie où l'on en trouve beaucoup dans le nord et la région centrale de l'île. Il s'agit sans doute de l'espèce du genre Liparis la plus connue et l'une des rares cultivée par les amateurs d'orchidées.
Liparis gibbosa
Un autre Liparis épiphyte également largement répandu dans toute l'Asie du sud-est. Bien que son aire de répartition soit large et qu'il s'adapte donc à de nombreux climats, il est ici peu prolifique et peu de spécimens se rencontrent dans les stations. Je n'ai observé que quelques plantes au Parc des Grandes Fougères, au Parc de la Rivière Bleue et ici au Sentier des Sources.
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